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Peuvent-ils tout dire ? (3/4)
Peuvent-ils tout dire ?
Pour être vraiment libres de s’exprimer, les médias doivent aussi l'être financièrement. Ce n'est pas si simple ! Seuls 2 Français sur 10 paient l'information, s'abonnent à des journaux... Les médias ont des difficultés à vivre, surtout la presse. Ils sont rachetés par des milliardaires, sont financés par la publicité... Peuvent-ils alors tout dire ?
Les espoirs des Résistants
En 1940, pendant la Seconde Guerre mondiale, le ministère de l'Information du gouvernement de Vichy voulait utiliser les médias (la radio, le cinéma et la presse) pour faire accepter aux Français qu'ils avaient perdu la guerre et que la présence des Allemands était positive. Des journaux ont préféré fermer (Le Canard Enchaîné, le Populaire...) ou partir dans des villes encore libres (Le Figaro, Paris Soir...). D'autres ont suivi la demande du ministère, soutenant les Allemands, écrivant parfois des horreurs sur les Juifs.
Aussi, quand les Résistants ont imaginé la vie après la guerre dans le programme des Jours heureux, ils ont souhaité « la liberté de la presse, son honneur et son indépendance par rapport à l'État, aux puissances d'argent et aux influences étrangères ». C'est-à-dire qu'ils ne voulaient pas d'intervention ou de contrôle de l’État, ni de personnes riches, d'entreprises ou de pays étrangers.
En 1944, un texte de loi interdit d'être à la direction de plus d'un journal. Pourtant, aujourd'hui, de grands groupes ont racheté de nombreux médias... sans que l'État s'y oppose vraiment.
Seule une loi, votée en 1986, limite le nombre de chaînes de télévision, de radios, de journaux que peuvent posséder une personne ou un groupe, mais elle est jugée insuffisante actuellement.
Les milliardaires font leurs achats
Dix milliardaires possèdent les principaux médias privés en France. Ils ont gagné de l'argent dans les télécoms, l'armement, le luxe... et maintenant, ils s'offrent des médias !
Un exemple ? Rodolphe Saadé, qui a fait fortune dans le transport maritime, a racheté la chaîne d'information BFM TV et la radio RMC. Il possédait déjà les journaux La Tribune, la Provence et Corse-Matin...
Mais pourquoi ?
Quand un journal est en difficulté, les milliardaires arrivent en « sauveurs ». Mais, pour rappel, les médias ont du pouvoir. C'est ce pouvoir que les milliardaires s'achètent. Avoir des médias, c'est échanger plus facilement avec les politiques, qui peuvent les aider dans leurs affaires... C'est aussi être sûr que leur groupe a une bonne image. Difficile pour les journalistes de critiquer l'entreprise qui les paie. Même s'ils en ont le droit, ils vont hésiter...
Longtemps, le fait que quelques personnes possèdent de nombreux médias ne semblait pas inquiéter les Français. Mais les méthodes de certains, dont le milliardaire Vincent Bolloré, interrogent.
Vincent Bolloré, un projet de société
Quand le milliardaire Vincent Bolloré achète des médias, cela se passe souvent mal. À Canal+, I-Télé (devenue CNEWS), Europe 1, Le Journal du Dimanche, il y a eu des grèves... Par exemple, les journalistes se sont opposés au choix de Jean-Marc Morandini comme animateur (accusé d'avoir fait des propositions sexuelles à de jeunes adolescents) ou d'un directeur de rédaction d'extrême droite Geoffrey Lejeune... Surtout, ils étaient inquiets de ne plus être libres. Chaque fois, ils n'ont rien obtenu sauf le droit de partir s'ils n'étaient pas contents. Des centaines de personnes ont quitté I-télé, Europe 1, le Journal du Dimanche... Certains expliquent qu'ils ne voulaient pas participer à cette « fabrique de la haine ». En partant, ils ont dû signer un document les obligeant à se taire, à ne pas faire de critiques et cela... toute leur vie.
Petit à petit, les reportages, qui coûtaient trop cher, ont été remplacés par des débats. Les animateurs (Cyril Hanouna, Pascal Praud, Christine Kelly...) « font l'agenda » (choisissent les thèmes qui feront débat dans la société) avec des sujets sur l'insécurité, le terrorisme, les agressions, l'immigration, l'islam... C8, CNEWS ont été condamnées plusieurs fois par l'ARCOM (Autorité de Régulation de la communication audiovisuelle et numérique), le gendarme de l'audiovisuel, à payer des amendes pour avoir encouragé la haine, la violence, pour des paroles racistes, homophobes, sexistes... Mais rien ne change ! Pour ces mêmes raisons, et parce que C8 ne respecte pas l'obligation d'inviter des représentants de tous les partis politiques, la chaîne a perdu le droit d'être diffusée gratuitement sur la TNT, à partir de 2025.
Si Vincent Bolloré ne voulait pas de ces idées discriminantes et violentes sur ses chaînes, il arrêterait. C'est donc ce qu'il souhaite comme projet pour la France. Avec tous les médias qu'il possède, mais aussi les magazines, les maisons d'édition, les instituts de sondage..., il a maintenant du pouvoir pour faire changer l'opinion des gens.
La publicité en conflit avec la liberté
Pour vivre, beaucoup de médias sont aussi financés par la publicité... Quand ils sont gratuits, ils vivent même en très grande partie par la publicité. Cela peut orienter le choix de l'information. Les lecteurs sont parfois des clients à attirer, plutôt que des citoyens à informer. Des publicités peuvent ressembler à des articles. Au moment de la Coupe du monde de football au Qatar, un média n'a pas pu enquêter sur les conditions de travail sur les chantiers, car cela n'aurait pas plu à Coca-Cola qui le finance...
Selon le documentaire Media Crash, quand, en 2014, Le Monde a publié un article sur les actions de Vincent Bolloré en Afrique, celui-ci n'a pas aimé. Il a demandé aux dirigeants de son groupe Havas, qui travaille avec de nombreuses marques, de ne plus publier de publicités dans le journal Le Monde. Le groupe a perdu 10 à 12 millions d’euros de revenus pendant 2 ans. Cela peut donner à réfléchir avant de publier une nouvelle enquête !
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