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L'avortement, un droit fragile
En France, un combat pas si vieux (3/4)
En France, un combat pas si vieux
Les femmes de moins de 40 ans peuvent penser qu'en France il a toujours été possible de s'informer sur la contraception (préservatifs, pilule, stérilet...), d'avorter en cas de grossesse non voulue... Pourtant, le combat pour obtenir ces droits a été long et difficile ! Il a été gagné grâce à des femmes qui ont fait preuve de courage.
La France voulait des bébés
À partir de 1810, les femmes qui avortent et celles qui les aident risquent la prison, les travaux forcés...
En juillet 1920, les députés décident de durcir la loi. Ils veulent des bébés pour la France ! Il y a eu trop de morts pendant la Première Guerre mondiale ! Beaucoup d'élus sont des anciens combattants. Ils s'inquiètent car les naissances baissent en France alors qu'elles augmentent en Allemagne. Pour certains, l'avortement met en danger la « race » française. Ils votent alors une loi qui interdit la contraception et même l'information sur la contraception... En déclarant défendre la vie, ils défendent surtout l'idée que le rôle de la femme est d'être mère et de faire des enfants.
En 1942, pendant la Seconde Guerre mondiale, sous le gouvernement de Pétain, les femmes qui avortent peuvent être condamnées à mort. Marie-Louise Giraud et Désiré Piogé ont eu la tête coupée pour avoir aidé des femmes à avorter. À la Libération, la loi de 1942 est supprimée mais l'avortement restera puni pendant plus de 30 ans.
Comment faisaient les femmes ?
Malgré les lois, les femmes ont continué à avorter. Elles le faisaient seules ou grâce à la solidarité féminine, avec des amies, en cachette, sur des tables de cuisine... Pour cela, elles avalaient des produits dangereux pour leur santé qui les rendaient malades, faisaient entrer dans leur utérus des aiguilles à tricoter, cintres (porte-manteau en métal), queues de persil, brosses à dents, eau de javel, eau savonneuse, sondes (tubes)... Dans les années 1970, chaque jour, une femme mourait pour avoir essayé d'avorter.
Celles qui avaient de l'argent partaient vers des pays voisins où l'IVG était autorisée : l'Angleterre, la Hollande, la Suisse...
Désobéir pour retrouver le droit de choisir
Des femmes ont décidé de combattre. Malgré la peur, elles ont choisi de ne pas obéir à la loi pour permettre aux femmes de choisir, d'avoir le pouvoir sur elles-mêmes, d'avoir les enfants qu'elles désirent. Des associations se sont créées comme le Mouvement pour le Planning Familial Français, le Mouvement pour la Libération des femmes, Choisir... Des phrases chocs, affichées dans les manifestations, sont restées : « Mon corps, mon choix », « Un enfant, si je veux, quand je veux »...
Une première avancée : la contraception
En 1967, le député Lucien Neuwirth fait voter une loi pour autoriser la contraception. Les femmes peuvent prendre la pilule sur ordonnance. La contraception sera remboursée à partir de 1974. Enfin, les femmes peuvent avoir des relations sexuelles sans avoir peur d'une grossesse non voulue.
« Je me suis fait avorter »
En avril 1971, le Nouvel Observateur publie un texte appelé le Manifeste des 343. Écrit par Simone de Beauvoir, il explique qu'un million de femmes se font avorter chaque année. Elles le font dans des conditions dangereuses parce qu'elles doivent se cacher pour ne pas être jugées. Pourtant, cette opération médicale peut être très simple. 343 femmes célèbres (Catherine Deneuve, Jeanne Moreau...) signent ce texte, disant : « On fait le silence sur ces millions de femmes. Je déclare être l'une d'elles. » Pour cela, elles risquent la prison. Elles demandent que la loi autorise l'IVG, qu'elle soit libre et gratuite.
En 1973, dans le même journal, est publié « Le Manifeste des 331 ». C'est une pétition dans laquelle 331 médecins reconnaissent avoir réalisé des avortements.
Le procès de Bobigny
En 1972, l'avocate Gisèle Halimi défend une jeune fille de 16 ans qui a avorté après un viol. Elle fait appel aux médias, à des scientifiques, des médecins... pour que le procès fasse du bruit. Elle veut montrer que la loi de 1920 n'est pas juste !
La jeune fille est jugée non coupable ! Le procès de Bobigny réussit à sensibiliser sur l'avortement et à faire évoluer la justice.
La révolution de la loi Veil
Simone Veil, présente un projet de loi à l'Assemblée nationale. Elle s'exprime presque uniquement devant des hommes. Après 3 jours et 2 nuits de combat, où la ministre de la Santé sera insultée, la loi Veil est votée le 29 novembre 1974, par 284 voix pour et 189 contre. Elle autorise l'IVG jusqu'à 10 semaines de grossesse, et même après s'il y a un risque pour la santé de la mère ou du bébé. Elle sera mise en place à partir de janvier 1975. Mais les femmes doivent continuer à se battre pour que la loi soit respectée.
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